CONFÉRENCE
Voici le texte Robert LATOUR d'AFFAURE (l'auteur du projet architectural) pour la conférence donnée avec Bernardo ATXAGA (l¹auteur de la dedicace) au Musée de Guéthary, le 3 novembre 2001 au sujet du "MIROIR ANCRÉ" de San Sebastian.

"ARCHITECTURE INTIME OUVERTE AU MONDE"


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"Je vis dans un cabinet de Alkmaar un globe terrestre entre deux miroirs qui le multiplient indéfiniment"
BORGES

"l¹Aleph"

INTRODUCTION

A- DÉMARCHE

1- TRADITION
2- SINGULARITÉ
3- MÉTISSAGE
4- L¹ESPRIT ET LE CORPS
5- DÉPLACER LA LIMITE DE L¹ARCHITECTURE
6- ORIGINE ET DÉFINITION DE L¹ARCHITECTURE

B- LE CONCEPT: "MIROIR ANCRÉ"

1- INTUITION ORIGINELLE
2- MONOLITHE
3- IDENTITÉ CULTURELLE: L¹ANCRAGE
4- LUMIERE
5- DISSIPATION DE L¹ESPACE TEMPS
6- JEU ENTRE LA TEXTURE & LE REFLET

C- LE PROJET ARCHITECTURAL

1- PARTI PRIS
2- INSCRIPTION DANS LE TERRITOIRE
3- RACINES
4- CROISEMENT DE DEUX OBJETS
5- LE PLAN
6- LA FORME
7- ÉQUILIBRE
8- REVETEMENT D¹ACIER INOXYDABLE POLI MIROIR
9- TUNNEL DE LUMIÈRE
10- ÉCLAIRAGE ZENITHAL
11- ESPACE INTÉRIEUR
12- PORTE PIVOTANTE
13- DIALOGUE DYNAMIQUE: OTEIZA
14- SIGNIFICATION: Bernardo ATXAGA: le visiteur heureux...

INTRODUCTION

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  Je tiens d¹abord à remercier Monsieur Le Maire de Guéthary et Jean François LARRALDE, Conservateur du Musée de Guéthary de nous accueillir ce soir dans ce lieu propice à la rencontre des arts et des artistes.

"ISPILU AINGURATUA" ("MIROIR ANCRÉ") est le fruit de plusieurs rencontres:Aitor de MENDIZABAL, le sculpteur, provoqua la venue à Biarritz des architectes de la ville de Saint-Sébastien. Odon ELORZA, le Maire de Saint-Sébastien, aprés avoir visité l¹édifice "COUP DE DÉS" à Biarritz m¹a demandé de concevoir pour le Paseo Berria une oeuvre d¹expression architecturale contemporaine.

"ISPILU AINGURATUA" fut le moment d'essayer de  nouer un lien intime et vital entre l'esprit de notre époque et l'essence même de l'âme basque.
Bernardo ATXAGA, lors de la signature de son livre "Pays basque et Culture, le Reveil du Hérisson" paru aux éditions CAIRN en 1999, composa la dédicace pour "ISPILU AINGURATUA".
Je présenterai le projet d¹une manière peut-être atypique en commençant par énoncer des considérations théoriques générales pour ensuite recentrer mon propos sur les caractéristiques particulières du projet.

 L¹exposé s¹ouvrira pour finir sur la présentation de la dédicace de Bernardo ATXAGA.

 

 

A- DÉMARCHE

La démarche architecturale se défini par une attitude vis à vis de plusieurs

thèmes:

 

1- TRADITION

L¹architecte traduit les aspirations d¹un peuple, d¹une communauté à travers son expression individuelle  J'extrais l'esprit sous-jacent aux structures traditionnelles et je le transmets dans son essence enrichi des innovations de l¹époque et des apports extérieurs.
Les traditions locales sont capables de restructurer les influences qu'elles reçoivent du dehors.

 

2- SINGULARITÉ

Il s¹agit de trouver une relation complice avec les choses, les apparences, les évènements et les usages. Ce qui compte c'est la singularité critique de l'analyse. Le passage exotique vers les choses. Trouver une voie, passer à travers. Derrière l'universel, trouver les singularités en terme physique, des évènements, des objets, qui ont leur propre règle du jeu.

 

3- MÉTISSAGE

La question d'aujourd'hui c'est d'être métis. Etre le résultat d'un métissage d'idées et de savoirs faire. Le métis est de l'entre-deux, il a des références culturelles croisées. C'est un devoir pour nous de considérer les différents angles de vues. Pour apprendre il faut s'exposer, appartenir à plusieurs cultures. J'ai l'idée positive que le métissage est une valeur pour demain d'apprentissage, de connaissance, d'adaptabilité.

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7- L¹ESPRIT & LE CORPS

L¹opération esthétique provient aussi bien du haut, l¹essence, que du bas, la matière. Il s¹agit d¹allier un référé conceptuel à un stimulus sensible.
L¹architecture a une dimension spirituelle qui doit toucher l¹âme du visiteur, elle doit parler au c¦ur, produire un effet profond. Tout vient de l'émerveillement. Le non mesurable est la seule chose qui captive l'esprit.
L¹architecture ne se comprend pas pleinement avec le cerveau, ni avec les yeux, mais surtout avec le corps. J'assemble, avec les énergies de mon corps, les éléments, dans un champ ouvert de perceptions sensorielles.

 

8- DÉPLACER LA LIMITE DE L¹ARCHITECTURE

Aujourd'hui je cherche à déplacer les limites institutionnelles entre lesquelles est habituellement classée l'architecture. Je suis à la recherche de références plastiques notamment dans le langage de la sculpture pour ouvrir d'autres registres à l¹esthétique architecturale.

 

10- ORIGINE ET DÉFINITIONS DE L¹ARCHITECTURE

L'origine de l'architecture n'est pas la cabane, la caverne ou la mythique "maison d'Adam au Paradis". Avant  de poser des pierres sur d'autres pierres, l'homme a posé une pierre sur la terre, pour reconnaître le lieu au milieu de l'univers inconnu.

 

La naissance de l¹architecture à été quelque chose de fantastique. Le seul fait de prendre une de ces pierres en Pays de Galles et de la transporter en Angleterre sur toute cette distance pour l¹ammener dans la plaine de SILBURY afin de construire le monument de STONEHENGE; quel acte incroyable et quelle immense vision de l¹avenir, mais aussi quel incroyable acte de violence dans le fait de réunir toutes ces pierres et de les dresser pour montrer combien elles sont imposantes.

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L¹architecture c¹est toujours la petrification d¹un moment de culture. On essaie toujours de pereniser un certains nombre de sensations qui sont ephémères.C¹est qualifier par un acte volontaire la nature esthétique des choses.

 

L¹idée vient de la première intuition de la beauté et de l¹emmerveillement qui s¹ensuit. Elle jaillit de notre génèse parceque, pour être, nous avons du faire appel à toutes les lois de l¹univers. Je crois que la beauté réside dans la lumière d¹être-exprimer, c¹est une selection, c¹est quelque chose qui s¹apparente à la plénitude d¹harmonie d¹une présence.

La vie est un mouvement de liberté. L¹architecture en général n¹aurait aucune valeur si elle ne produisait pas une liberté pour les visiteurs, les habitants de la ville, les gens qui entrent dans le bâtiment, où ceux qui le voient. Je pense que c¹est cela le but de l¹architecture, le but de tout art est d¹engendrer une liberté qui peut aller jusqu¹à l¹effacement de la technique qui lui a permis de naître, je pense que c¹est comparable à la musique. On maîtrise tellement bien tous les aspect techniques de la musique qu¹on entend plus que les notes, la musique pure.

Aujourd¹hui je pense que c¹est à l¹architecture de se plier par des processus photosensibles aux variations des climats, des atmosphères, des topographies, des situations et des usages, dans un acte de recyclage plutôt que de rupture. Le référent n¹est pas inscrit dans les tables de la loi mais ICI ET MAINTENANT, ramassé sur le site même, sur le territoire du projet. C¹est de l¹essence même, de la substance de chacun des lieux et milieux qu¹une véritable pensée de la ville peut à nouveau émerger.

Substituons à la culture contemporaine de l¹effraction, une Culture du Lieu.

Comme substrat à la création architecturale.

Il s¹agit d'éviter les régressions historiques autant que les projections modernes, pour suivre un principe réactif de pertinence et non de style. À la culture de la forme néo classique ou néo basque il s'agit de substituer une Culture du Lieu. Le mouvement moderne c'etait plus l'Espace et la Forme ("le jeu savant correct et magnifique des volumes assemblés sous la lumière" de Le Corbusier), aujourd'hui c'est plus la Matière et la Corporalité du Lieu, matière chaude, froide, attractive, répulsive, moite, sèche, coupante, douce, d'usure et de mémoire. Le nouveau paramètre c'est l'exploitation du Lieu comme matériau de l¹architecture.

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B- LE CONCEPT: "MIROIR ANCRÉ"
(notion d¹ouverture et d¹intimité)
le projet est baptisé "ISPILU AINGURATUA" en langue basque, ("MIROIR ANCRÉ").

Ce nom exprime l¹essence même de l¹idée originale. Il évoque à la fois
- l¹ouverture aux mondes avec le miroir: ispilu
- et le caractère local, identitaire, maritime par l¹ancrage: ainguratua.

1- INTUITION ORIGINELLE:

L¹intuition originelle d¹un Monolithe ancré dans la roche vient de l¹idée utopique d¹installer un cube blanc sur un rocher en 1986. Une relation significative et sensuelle naissait alors ici entre ces deux objets juste assemblés: le profil élémentaire aux dimensions humaines du "CUBE", platonicien, lisse, rationnel, simple, autonome, moderne et la forme naturelle, fractale, complexe, éternelle, apparemment chaotique, de la poche. Cette combinaison dynamique interrogeait et provoquait une réaction poétique, non mesurable, indicible...

2- MONOLITHE

La forme du monolithe est unitaire, c¹est un objet spécifique, simple, se laissant apréhender en tant que forme globale. Elle requiert les qualités de complétude, d'unicité et d'indivisibilité.
Le grand cube noir au milieu de la Mecque, la "KAABA", au c¦ur duquel est scellée la pierre noire sacrée envoyée à ABRAHAM par l¹ange GABRIEL, et la dalle symbolique du film "2001 Odyssée de l'Espace" réalisé en 1968 par Stanley KUBRICK montrent combien le monolithe est intemporel et universel.

3- IDENTITÉ CULTURELLE: L¹ANCRAGE

"MIROIR ANCRÉ" se fond dans la roche basque. Il fait partie intégrante de la montagne. Il suscite un sentiment d¹appartenance au Lieu. C¹est la matière même de la roche qui devient un élément du langage architectural.
L¹ancrage pose la question de l¹identité culturelle.

4- LUMIERE

La question de la lumière est à la base de la perception de l¹architecture. Tout ce qu¹on peut lire est conditionné par la lumière. Ce qui est interessant dans la lumière c¹est la symbolique de la vie liée à la symbolique de l¹instant. Elle est souvent liée au changement. Comment relier le problème de l¹instant au problème de la durée, comment faire en sorte qu¹un bâtiment puisse procurer des sensations trés éphémères et évolutives?.

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5- DISSIPATION DE L¹ESPACE TEMPS

Par le reflet le spectateur accède à une nouvelle perception du monde vers une Dissipation de l¹Espace Temps. L¹effet de Miroir provoque une ouverture infinie des espaces, la dislocation de l¹environnement, les effets de regard sont multiples.dans le déploiement de jeux de reflexions de scintillements et d¹éclats infinis et vertigineux. Le Miroir à la faculté de capter le changement de lumière, la variation du temps. Par ses faces miroir le monolithe déconstruit l¹espace. La luminosité casse la configuration spatialle et la morcelle. À cause des changements continuels du ciel, il y a un état de fluctuation permanente. Ces jeux spéculaires offrent une lisibilité remarquable, et sont conçus comme un «système de mise à nue» du contexte.

J¹essaie d¹exposer l¹inox poli miroir comme un endroit où la lumière se concentre. Un endroit où l¹on comprend le changement des saisons où la lumière du jour devient visible. C¹est comme si l¹inox poli etait utilisé pour arrèter le temps pour pouvoir le lire ou le comprendre.

L¹effet du miroir est optique, cinématique et lié au processus psychologiquede perception du spectateur. La  capacité du Miroir d¹absorption et d¹intégration du spectateur influe sur son comportement et élargit le champ de sa perception. Cependant, cette attirance irrépressible suscitée par toute surface réflechissante se double aussi d¹un sentiment d¹étrangeté.
L¹effet de mise en abyme est double, spatial et temporel, et le spectateur n¹est plus seulement cantonné au rôle de récepteur mais participe aussi au processus de la perception de l¹¦uvre.

6- JEU ENTRE LA TEXTURE ET LE REFLET

Le reflet est une image abstraite de laquelle la matière a été extraite. Une telle image ne peut être atteinte que par les yeux. Nous sommes simplement si habitués à associer l¹image à la matière que le reflet est suffisant pour créer une illusion de toucher ou de parfum ou de goût ou de son. La texture concerne tous ces sens car elle implique le contact et ce contact avec la matière génère l¹odeur, le bruit, le goût et bien sûr la sensation de toucher.

Dans le projet "ISPILU AINGURATUA" la roche qui enveloppe le monolithe miroir dématérialisé avec la texture granulaire de la pierre fait autant partie du projet que le monolithe lui-même.

Le projet dépasse les limites de la construction.

La manière fragmentée dont se développent les paysages urbanisés aujourd¹hui, manifeste concrètement un renversement radical de nos anciennes conceptions de l¹Espace-Temps jusqu¹alors basées sur un sentiment de linéarité et de centralité et remplacé aujourd¹hui par des valeurs de fragmentation, de dissipation, d¹incertitude et d¹éclatement.

"ISPILU AINGURATUA" est à la fois fondu dans le lieu et singulier, "Caméléon" et "Attracteur Étrange".

C- LE PROJET ARCHITECTURAL - analyse

 Le projet est un corps à corps, le moment où l¹on se bat pour le passage de l¹existence mentale à la présence de quelque chose qu¹on visualise. L¹important c¹est la précision, la justesse et la perfection des éléments.

"ISPILU AINGURATUA" est un monolithe réflechissant d'acier inoxydable ancré dans la roche du mont Urgull sur le Paseo Berria face à l'Océan à Saint-Sébastien. La rectitude de sa forme révèle par effet de miroir la complexe richesse du site où se confrontent violemment le vent, le soleil, la montagne et l'océan.

"ISPILU AINGURATUA" est une forme unique qui révèle le paysage au spectateur.


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1- PARTI PRIS

"ISPILU AINGURATUA" se positionne dans un dialogue amical et dynamique avectrois ¦uvres importantes existantes dans le contexte environnant:

- Le Peigne des Vents du sculpteur Eduardo CHILLIDA construit en 1976 à l¹autre extrémité de la Concha. composé de trois formes courbes expressives en acier corten fixées aux rochers.

- Les roches échouées sur la plage du KURSAAL, le palais des congrés édifié par l¹architecte Rafael MONEO et achevé en 1999, implanté en front de mer à l¹embouchure du fleuve Urumea. Il est composé de deux cubes de verre sablé luminescents la nuit .

- Le portique de Jorge OTEIZA qui s¹intitulera "Construction Vide avec Quatre Unités Pleines Positif-Négatif" agrandi à six mètres d¹aprés une pièce de 1957, en acier corten.

Le projet "ISPILU AINGURATUA" se situe dans une affinité elective avec les sculpteurs basques OTEIZA et CHILLIDA, et dans un même temps ouvre une nouvelle voie traduisant l¹évolution de la conscience esthétique du peuple basque.

1- La démarche de CHILLIDA est en partie d¹exprimer dans les formes qu¹il produit les capacités expressives de la matière.

2- La démarche de MONEO etait déjà en partie d¹orienter les parties de l¹édifice architectural vers les éléments caractéristiques du paysage géographique et pas selon la trame quadrillée de la Ville.

3- La démarche d¹OTEIZA qui relève de l¹expérimentation à tendance à une rationalisation de la forme.  Il refuse toute émotivité, et accorde de l¹ importance au vide et à l¹espace au détriment de la matière et du lieu. La pièce qui sera installée sur le Paseo Berria fut initialement conçue à une taille petite de quelques centimètres indépendament de tout site.

Pour "ISPILU AINGURATUA" le parti pris est essentiellement lié au Lieu.

Entre le projet de Biarritz et celui de Saint-Sébastien les problèmes de site ne sont pas les mêmes. Je m'efforce à chaque fois de saisir l'âme du site, de ne pas me répéter formellement, et de ne pas refaire ce qui a été fait. J'aime le défi que pose toute nouvelle difficulté. La situation du terrain est décisive pour déterminer la forme définitive de la construction.
À Biarritz "COUP DE DÉS" ("USTEGABEKO SEIKIAK") bâtit en 1998 est un Macle Ternaire dont chaque unité volumétrique est revêtue d¹une matière épidermique différente.

J¹accorde une importance égale à la Forme, à la Matière, à l¹Espace et au Lieu. le Lieu est cependant conçu comme la matière première du projet architectural.

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2- INSCRIPTION DANS LE TERRITOIRE

La position du bâtiment par rapport à la Ville et aux éléments géographiquesdu Lieu est trés importante, la relation à la "CONCHA" (la baie de SaintSébastien), à l¹ile SANTA CLARA, aux Monts IGELDO et URGULL.  Il s¹est agitd¹exprimer le positionnement exceptionnel de ce bâtiment par rapport à la Ville en fonction de la Roche et de l¹Océan.

 

J¹ai choisi l'implantation du monolithe et le sens de son orientation en relation aussi avec les circulations pietonne et automobile, l'axe de la route, la sculpture-portique de Jorge OTEIZA, le "Peigne des Vents" d¹Edouardo CHILLIDA, la nécessité de définir un parvis devant l'entrée de l'édifice, l¹intention de construire une émergence parfaitement accessible vers laquelle le public converge, l'espace vide du parking, la batterie de défense SANTA CLARA, le soleil couchant au solstice d'été.Les matériaux du projet sont la lumière, la tectonique, la roche et le climat.

La pièce d¹architecture-sculpture est un trait d'union qui relie les éléments du paysage.

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3- RACINES

Au commencement nous avons excavé la montage afin d¹y insérer partiellement l¹édifice. Vingt cinq tirants disposés autour de l'excavation d¹aprés les indications de l¹ingénieur qui s¹etait déjà occupé du "Peigne des Vents" Juan RODRIGUEZ AVIAL pénètrent dans la pierre à une profondeur moyenne de sept mètres. Ils renvoient les forces de gravité au c¦ur de la montagne et indiquent qu¹une grande tension contenue existe dans le rapport entre le monolithe et le roc.

 

4- CROISEMENT DE DEUX OBJETS

Le projet est le croisement improbable du "Monolithe Miroir" et du "Tunnel de Lumière". (Comme le devin à tète d¹oiseau et le bison représenté dans la grotte de LASCAUX et dont la tète d¹oiseau ressemble à celle figurant dans ce tableau du peintre ZUMETA).

 

5- LE PLAN:

Le tunnel de lumière perpendiculaire au Paseo Berria est orienté vers le soleil couchant sur l¹océan au solstice d'été (là où le soleil flamboie et révèle la beauté du monde). Le monolithe est lui implanté parallèlement à la batterie SANTA CLARA et dirigé vers la sculpture d'OTEIZA. Le plan seul de l¹édifice ne suffit pas à tout comprendre. Il exprime essentiellement les deux directions croisées du monolithe et du tunnel et un certains rapport avec la roche. Ces deux directions expriment la volonté de mettre l¹édifice architectural en relation avec l¹environnement jusqu¹à atteindre l¹échelle cosmique à l¹instar des ¦uvres actuelles d¹artistes du territoire ou des temples Incas ou des sanctuaires d¹un Culte Solaire comme le monument mégalithique de STONEHENGE (que j¹ai déjà cité) en Grande Bretagne composé de Monolithes disposés sur une aire circulaire et formant un Miroir Intérieur.

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6- LA FORME

La forme trés simple de l¹édifice suggère un mouvement utopique: l¹oblique. C¹est un basculement de l¹espace orthogonal d¹origine transformant les plans horizontaux et verticaux en plans obliques. Il donne à la fois le sentiment de sombrer dans le sol de la promenade publique et de jaillir de la montagne.

 

7- ÉQUILIBRE

Le monolithe s'insère précisément dans les strates de pierre inclinées aux contours de découpes courbes qui l'enveloppent. Les degrés d¹insertion et de basculement partiels du monolithe dans la roche sont précisément déterminés par le point d¹équilibre limite situé à l¹intersection des plans verticaux et obliques de la roche et de l¹angle encastré du monolithe ainsi que du plan incliné de la toiture.

 

8- REVETEMENT D¹ACIER INOXYDABLE POLI-MIROIR

Le revêtement d'aspect poli miroir d'une planéité quasi parfaite et uniforme réagit à la lumière selon une infinité de nuances, il favorise l'intégration automatique de l'édifice dans son environnement urbain et paysager.Vue de loin la pièce est un point de lumière dans le paysage. Ses faces réverbèrent la luminosité mouvante du soleil, les turbulences de l'océan et les perturbations dans le ciel. En plein soleil le métal devient d'aspect opaque. De près et à contre-jour il s'efface en reflétant l¹image des éléments constitutifs du lieu: l'océan, l'île, la végétation, la sculpture, etc....

Le toit transmet aux promeneurs dans la montagne l'image toujours changeante du ciel et des nuages. Les faces à demi encastrées du monolithe s¹assimilent visuellement à la roche et s¹identifient à elle. La face principale de l¹entrée réfléchit l'image en mouvement des personnes sur le Paseo.

La structure du monolhite en béton banché est revêtue de panneaux sandwich en acier inoxydable 316L vingt dixième poli miroir. Ces panneaux d'un mètre de large couvrent la hauteur de l'édifice et se replient pour envelopper l'angle des murs. Ce qui a pour effet de définir les arètes du prisme de façon trés précise et épurée. La grande verrière de toiture encastrée est aussi revêtue de panneaux sandwichs traversants d'acier poli-miroir brise- soleil disposés en alternance égale de vides et de pleins. Retour au sommaire

9- LE TUNNEL DE LUMIERE

Le "Tunnel de Lumière" à l¹intérieur de l¹édifice enveloppe le corps du visiteur. C'est le C¦ur du Corps architectural. C¹est une tentative de traduire dans le langage de l'architecture les recherches d'OTEIZA sur la lumière appliquées a des pièces d'albâtre percées et traversées de cavités cylindriques dans lesquelles la lumière passe et se condense. Cet objet presque cylindrique et couché traverse en biais l'espace intérieur et cadre vers l¹extérieur la vue sur l¹océan.  La lumière naturelle zenithale se diffuse à travers la matière blanche translucide opalescente du tunnel pour éclairer l'entrée.

10- ÉCLAIRAGE ZENITHAL:

La lumière naturelle zenithale se diffuse uniformément dans l'espace à travers la verrière entre les bandes traversantes d'acier poli-miroir brise- soleil disposée en alternance égale de vides et de pleins. La toiture est une interface lumineuse provoquant dans l¹espace intérieur des ambiances d¹ombres en striures qui graduent progressivement les parois blanches suivant le déplacement du soleil dans la journée.

11- ESPACE INTÉRIEUR:

L¹ambiance intérieure de l¹espace blanc abstrait renvoie à l¹atmosphère intérieure d¹apesanteur du vaisseau spatial en orbite autour de la planète "Solaris" dans le film du même nom du réalisateur Russe Andrei TARKOVSKI tourné en 1972.

12- LA PORTE PIVOTANTE

La porte ovale en acier inoxydable poli miroir double face à pivot central de l¹entrée épouse le contour du tunnel opalescent. Fermée elle se fond dans le plan miroir de la façade principale afin de disparaître et de restituer au monolithe toute la pureté, la force, et la simplicité de sa forme. Toute la journée la porte pivotante reste ouverte en position fixe dans l¹axe du tunnel et les visiteurs pénètrent dans cette sorte de "crypte" de part et d¹autre du grand panneau poli-miroir qui complexifie à l¹entrée les jeux de reflexions d¹images. Lors de fortes marées la porte pivotante miroir du porche se referme comme dans un bâtiment submersible afin de resister à l'agression des vagues les plus puissantes. Au coeur de ces paroxysmes climatiques l'édifice évoque pleinement une pièce pure de métal brut. Tout l'espace participe à l'architecture qui est en osmose avec le site.


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13- DIALOGUE DYNAMIQUE

L¹architecture doit établir un dialogue avec ce qu¹il y a autour. L¹intention est de participer à un dialogue dynamique et amical avec la sculpture d¹OTEIZA en concevant ensemble, Sculpture et Architecture, dans un dispositif spatial complexe à plusieurs niveaux de lecture: religieux, spirituel, cosmologique, paysager, géographique, sculptural et architectural. Aucun champ d¹investigation n¹est écarté. L¹ensemble est conçu dans l¹alignement du faisceau théorique de lumière qui traverse la baie et qui relie

"ISPILU AINGURATUA", le portique d¹OTEIZA, l¹île SANTA CLARA, et le "PEIGNE DES VENTS" de CHILLIDA

14- SIGNIFICATION
- Bernardo ATXAGA: le visiteur heureux...

Il existe des exemples significatifs de croisement entre les langages artistiques. La villa monolithique de l¹écrivain MALAPARTE conçue par l¹architecte LIBERA fut ancrée en hauteur dans un éperon rocheux face à l¹océan à Capri en 1942. Jean Luc GODARD y tourna le film "Le Mépris" d¹aprés un roman de MORAVIA. Les scènes évoquant l¹ODYSSÉE d¹HOMERE furent tournées sur le toit-terrasse de cette maison offrant une vue dominante panoramique sur la méditéranée. Le plan final du film montre Fritz LANG (l¹auteur de "Métropolis") qui tourne le premier regard d¹ULYSSE quand il revoit sa patrie ITHAQUE.

Dans ce film plusieurs langages se cotoient: architecture, mythologie, litérature, cinéma, paysage. Chaque langage dynamise l¹autre.

La littérature, la poésie, la langue ont la capacité de suggérer des images et des concepts forts ainsi que de donner une signification à l¹architecture.Le poème de MALLARMÉ, "Un Coup de Dés jamais n¹abolira le Hasard" fut le fondement conceptuel du projet de Biarritz: "Ustegabeko Seikiak" ("Coup de Dés").

La dédicace en langue basque de Bernardo Atxaga donne une signification à "ISPILU AINGURATUA", elle évoque l¹ouverture au Monde

Elle sera trés bientôt gravée sur les deux faces de la porte pivotante. Les visiteurs pourront la lire en entrant dans le "tunnel de lumière".

"Ispilu honetan mila begi (1) jarriko dira (eta mundua)(2)"

 

(1) Ispilu, beraiek ere... (2) Beste hainbat munduren ispilu...

 

"Dans ce miroir mille yeux (1) se poseront (et le monde)(2)"

Durant l'émission de Bernard PIVOT " Bouillon de Culture " tournée en mai 1999 dans l'atrium du Musée Guggenheim de Bilbao vous disiez Bernardo ATXAGA:

" Il y a un territoire pour la tradition culturelle et il s¹appelle le Monde "

d'aprés vous

" Est-ce que ce sont les Particularismes qui font évoluer le Monde Où est-ce le Monde qui change les Particularismes? "


Robert Latour d'Affaure.

 


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Voici le texte Robert LATOUR d'AFFAURE (l'auteur du projet architectural) pour la conférence donnée avec Bernardo ATXAGA (l¹auteur de la dedicace) au Musée de Guéthary, le 3 novembre 2001 au sujet du "MIROIR ANCRÉ" de San Sebastian.

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