Les brèves
Sculpture

 "L'évidence d'une certaine rudesse"

Christophe Doucet vise à une singulière clarté. Il fabrique, à l'aide de
bois et de fer, des outils et des cabanes, des instruments tranchants et des
abris familiers. Il n'y a pas matière à s'interroger. On identifie sans
peine une charrue, un râteau. une hache ou une petite construction en
planches et tôle ondulée. On remarque le caractère rudimentaire des éléments
assemblés, une certaine rudesse dans la présentation mais sans pour autant
douter de l'efficacité de ces objets et de ces constructions.
Ce qui frappe, c'est l'intensité de leur évidence et de leur nécessité. Or,
c'est là qu'est le trait surprenant de la transposition. Ces objets et ces
constructions trahissent une naïveté savante. Ils sont si transparents
qu'ils deviennent les fantômes des alliances du monde et de l'esprit, de
l'art et de la nature. De là, l'importance accordée aux dime'nsions du
corps, à ses gestes, ses humeurs, aux ressources de sa concentration
d'énergie.
Christophe Doucet remonte à la violence salutaire des initiations
primitives. Il s'impose le souci de l'âpreté, de la dureté et l'impérieux
désir de rassembler l'essentiel. Dans ses oeuvres, le processus
d'élaboration est célébré comme le substitut d'un art rituel dont notre
temps a perdu le secret. Christophe Doucet relève les défis du corps, des
limites meurtrières de son existence, de la force de son absence, de sa
lumière et souligne l'utilité d'adapter ses imperfections, ses faiblesses à
un ordre général des choses, à l'équilibre de l'univers.

Didier ARNAUDET, 1993

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